Phobos
Phobos est la plus grande des deux lunes de Mars, l’autre étant Déimos. De forme irrégulière, elle ne fait que 27 km dans sa plus grande dimension. Phobos orbite à seulement 6000 km au-dessus de la surface de Mars. C’est un des objets les plus sombres du système solaire, sa surface est très cratérisée et, spectroscopiquement, il ressemble comme Déimos à un astéroïde de type C (objet sombre et riche en carbone de composition similaire aux chondrites carbonées) .
L’origine des deux lunes Phobos et Déimos est encore en débat. Il pourrait s’agir d’astéroïdes capturés dans le champ de gravitation de Mars, de vestiges d’un satellite plus gros, ou alors du résultat d’un impact qui aurait donné naissance aux deux corps, un scénario analogue à celui de la formation de notre propre Lune. Comprendre l’origine de Phobos était l’objectif principal de la mission Phobos-Grunt.

La mission Phobos-Grunt
Phobos-Grunt (en russe Фобос-Грунт c’est-à-dire sol de Phobos) a été lancée le 9 novembre 2011. Toutefois, les manoeuvres qui devaient la placer sur une orbite permettant son transfert vers Mars n’ont pu avoir lieu et la sonde est retombée dans l’océan Pacifique le 15 janvier 2012. Après 11 mois de voyage, la sonde aurait dû étudier pendant quelques mois Mars et ses lunes, puis se poser sur Phobos. Elle aurait alors prélevé environ 200 grammes d’échantillons du sol, les aurait déposés dans une petite capsule qui serait revenue sur Terre en 2014. Phobos-Grunt emportait aussi une charge utile qui devait fonctionner pendant environ une année à la surface et étudier notamment in situ la composition du sol du satellite.

Phobos-Grunt était équipé d’une charge utile de plus de 20 instruments. Son objectif était d’étudier l’environnement ionisé de Mars et l’atmosphère de la planète, et surtout de caractériser, physiquement et chimiquement, la surface de Phobos. La France a participé à trois des instruments de l’atterrisseur : un chromatographe en phase gazeuse (GC), un spectromètre laser (TDLAS) et un microscope visible et infrarouge (MicrOmega).
L’instrument MicrOmega-Phobos
MicrOmega-Phobos devait examiner les échantillons collectés à la surface du satellite pour en caractériser la structure et la composition à l’échelle des grains individuels. Il peut être considéré comme un prototype de l’instrument MicrOmega développé par l’IAS et le LESIA pour le rover de la mission ExoMars, lancé en 2018. Il s’agit d’un imageur hyperspectral visible et infrarouge proche qui fournit pour chaque pixel imagé d’environ 20 micromètres un spectre complet allant de 0,9 à 3,1 μm, ce qui permet d’identifier les phases carbonées et/ou hydratées éventuellement présentes. L’échantillon est éclairé en lumière monochromatique par une lampe à filament de tungstène couplée à un filtre AOTF (Acousto Optical Tunable Filter). Le détecteur, un capteur infrarouge de 512 x 256 pixels, est refroidi à environ 110 K (-160°C) par une machine cryogénique. L’instrument est contrôlé par une carte électronique dédiée qui assure aussi l’interface avec la sonde.
Structure du projet
MicrOmega-Phobos a été développé sous la responsabilité de l’Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS) à Orsay. Le « Principal Investigator » (PI) est Jean-Pierre Bibring. Les partenaires impliqués sont :
- Institut d’Astrophysique Spatiale (IAS), Orsay :
Laboratoire maître d’œuvre, responsable de la fourniture de l’instrument global testé et étalonné - Laboratoire d’Etudes Spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique (LESIA), Meudon :
Laboratoire responsable de la fourniture de la carte électronique de MicrOmega et de la caractérisation du détecteur infrarouge - Space Research Institute (IKI), Moscou :
Laboratoire responsable de la fourniture du filtre AOTF, de son électronique d’alimentation et du système de nettoyage de la vitre sur laquelle seront déposés les échantillons
L’instrument a été livré et intégré à l’IKI en juillet 2011.
MicrOmega au LESIA
Réalisation
Le LESIA avait en charge la fourniture de la carte électronique de MicrOmega ainsi que la caractérisation du détecteur infrarouge.
La carte communique avec le rover via une interface RS485, elle est alimentée par des tensions de +5V et +15V fournies par la sonde. Elle doit assurer les fonctions suivantes :
- gestion des télécommandes et de la télémétrie
- génération de l’alimentation radio fréquence du filtre AOTF (responsabilité IAS/IKI)
- commande de la machine cryogénique et des sources de lumière
- commande du détecteur, acquisition et numérisation des images
- mise en forme et numérisation des informations de servitude (températures, courants, tensions)
L’électronique de proximité, comme celle développée pour MicrOmega-Exomars, comprend un ASIC, où est encapsulée toute l’électronique analogique de front, un FPGA, où est encapsulée l’électronique numérique assurant le contrôle de l’instrument, et un convertisseur analogique-numérique (ADC). La réalisation a été confiée à un sous-traitant (EREMS) qui a repris l’architecture proposée et une partie de la schématique mais avec un autre composant (ADC).
Le LESIA a d’autre part participé au choix du détecteur infrarouge en étroite collaboration avec l’IAS et pris en charge la caractérisation du modèle de vol. Les mesures ont été effectuées en juin 2011 sur un banc d’étalonnage optique développé au LESIA pour les instruments MicrOmega sur ExoMars et VIHI sur Bepi Colombo.
Personnels du laboratoire impliqués
Nom | Responsabilité |
---|---|
Bruno Bézard | responsable scientifique |
Tristan Buey | chef de projet |
Yann Hello | architecture système |
Régis Schmidt | expertise électronique numérique |
Hassan Mir | caractérisation ASIC |
Alessandro Voltolina | équipement de test électrique |
Contact : Bruno Bézard